Premier Luxembourgeois à avoir adopté l’hydrogène pour ses déplacements, Guy Breden (51 ans) n’en démord pas: ce gaz a de l’avenir dans les moyens de locomotion.
Lavée soigneusement, sa Toyota Mirai II étincelle sous le soleil d’hiver. Des airs de Prius, une jolie robe rouge, des lignes élégantes… Ni sobre ni gloutonne, elle réclame un plein tous les 600 km environ. Le hic, c’est qu’il n’y a pas encore de pompe à hydrogène au Luxembourg, et que le résident de Kehlen (où il est conseiller communal CSV), s’est résolu à sacrifier à une expédition régulière à Sarrebruck pour s’approvisionner en carburant. “Cela me coûte 200 km de déplacement, et m’autorise donc à faire 400 km au pays. C’est la raison pour laquelle j’ai conservé mon ancien véhicule: je n’ai pas l’occasion chaque semaine de faire une excursion en Allemagne. Mais dès qu’une station proposera l’hydrogène au Grand-Duché, je me limiterai à cette voiture”.
Sous le capot avant, la pile à hydrogène. A l’arrière, le moteur, directement en prise avec le train arrière: c’est une propulsion. L’habitabilité n’est pas exceptionnelle: il faut caser, deux réservoirs à hydrogène, une batterie, une pile à combustible, un convertisseur survolteur, un moteur électrique et une unité de contrôle de puissance. L’oxygène présent dans l’atmosphère pénètre dans la calandre avant du véhicule, tandis que l’hydrogène est fourni par les réservoirs. Le véhicule ne rejette qu’un peu de vapeur d’eau très propre.
“Elle se conduit comme une électrique classique, tout simplement”, explique Guy Breden. La grosse différence, c’est qu’il ne faut que trois minutes pour faire le plein d’une voiture à hydrogène. Ah, si l’infrastructure était là!
“Je m’intéresse beaucoup aux nouvelles technologies et au développement durable, confesse Guy Breden. Je me suis donc informé sur l’hydrogène, qui fait partie des moyens devant nous permettre de nous exonérer des énergies fossiles. Et comme mon épouse est chimiste, nous avons fait le tour du sujet: j’ai repris ses cours, je me suis inscrit dans des forums, j’ai recherché, questionné… En fait, le recours systématique aux batteries me fait peur quand on parle de mobilité; le large recours aux métaux rares, les questions liées au recyclage interpellent. La pile à énergie est nettement plus recyclable que les batteries. Dans ses plans, l’Etat réserve plutôt l’hydrogène à l’industrie. Moi je pense que la mobilité ne peut pas forcément s’en exonérer.”
“Cela dit, les rares véhicules à hydrogène n’étaient pas très jolis… puis est venue la Toyota Mirai (63.000 euros, hors options). Je suis tombé sous son charme. Toyota Luxembourg a pu me la procurer. Je l’ai même reçue un peu trop tôt (fin janvier 2021), alors qu’aucune pompe n’était encore disponible à une distance raisonnable” De l’hydrogène pour les gros véhicules, on en trouve en effet relativement facilement… mais il n’est compressé qu’à 350 bars, alors qu’une voiture requiert 700 bars pour tirer parti de sa meilleure autonomie. En mars, la pompe de Sarrebruck entrait en service, et les excursions sarroises de Guy Breden commençaient.
“Ne pouvant me rendre à volonté en Allemagne, j’ai conservé mon ancien véhicule, en attendant l’ouverture de pompes luxembourgeoises. Avec chacune de mes voitures, je parcours environ 7.000 km par an”.
“Vu mon profil de conducteur, une voiture électrique classique correspondrait à mes besoins, mais il ne me déplaît pas de porter le débat sur l’hydrogène. Je suis un peu le porte-parole au pays de ce carburant, de ce mode de mobilité. Je peux partager mon expérience avec les médias, mais aussi avec des industries très intéressées par le sujet. Je pense que la mobilité doit se partager entre l’électrique pur pour les véhicules les plus légers et l’hydrogène au-delà d’un certain poids. Reste à définir le point de bascule. Reste aussi à fabriquer de l’hydrogène totalement vert. En attendant, rouler avec de l’hydrogène gris n’est pas une aberration.”