36e Journée MoSarLorLux: entre histoire industrielle et projets d’avenir

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Pour le cru 2024 des Journées de l’Ingénieur MoSarLorLux, la main revenait à l’IESF Lorraine (Société des Ingénieurs et Scientifiques de France). A charge pour notre association sœur de concocter un programme attractif, instructif, culturel et convivial. Défi relevé à 100% pour cette journée sympathique aux confins de la France et de l’Allemagne, entre Hambach et Sarreguemines. Fidèles au poste dans le cadre de la FDIS, les associations allemandes VDI Sarre et Moselle étaient de la partie, comme nos membres de l’association des Ingénieurs et Scientifiques du Luxembourg qui avaient choisi de ne pas manquer cette escapade.

L’ancienne usine Smart

Les automobilistes partant vers Strasbourg et la Suisse connaissent bien la tour Smart, qui signalait l’usine de voitures au bord de l’autoroute de l’Est, née d’un projet fou entre l’horloger suisse Nicolas Hayek et Daimler. L’énorme site de Smartville, inauguré en 1997 par le président Jacques Chirac et le chancelier Helmut Kohl, symbolise la coopération industrielle entre Sarre et Moselle, dans une région où la frontière toute symbolique n’est soulignée que depuis peu par les récents contrôles allemands. Ici, on va de Sarreguemines à Sarrebruck en tram, comme si on allait de Luxexpo au Stade de Luxembourg. Le tout récent départ de la production des Smart vers la Chine n’a pas manqué de mettre en évidence les difficultés de la production industrielle européenne… et de sa rentabilité. La dernière Smart est sortie de l’usine au printemps 2024.

Fin 2020, le nouveau constructeur britannique Ineos-Automotive a repris le site de Hambach. Il y produit son 4×4 Grenadier, né d’un nouveau pari un peu fou, celui du milliardaire Jim Ratcliffe, qui a fait fortune dans le secteur de la chimie. Automatisée à 85%, dans 230.000 mètres carrés de bâtiments, la production utilise 353 robots au ferrage. 1200 salariés y travaillent; leur âge moyen est de 45 ans, ce qui indique une pérennité certaine dans l’emploi, certains ouvriers œuvrant là depuis le baptême de la Smart. L’usine a pris le virage du développement durable, passant des contrats verts pour le gaz et l’électricité, travaillant sur la réduction des solvants et comptant bientôt sur la biomasse pour fournir le chauffage. 99% des déchets sont valorisés.

Le centre de communication de l’usine accueillait la séance académique d’une journée placée sur le thème du développement industriel, sous la baguette inspirée du chef d’orchestre Christian Jousset, secrétaire de l’IESF Lorraine.

Un géant du photovoltaïque en gestation

Le caractère frontalier de la zone recèle évidemment beaucoup de similitudes par rapport au contexte luxembourgeois. La recherche du Graal industriel est, ici, encore plus critique. Les responsables politiques ont dépeint une région d’artisanat et d’industrie qui a su se diversifier, mais qui se désole de voir ses talents quitter le pays pour des régions plus prospères. La transition énergétique et numérique ouvrira-t-elle de nouvelles voies? C’est le pari d‘Holosolis, la plus grande usine de panneaux photovoltaïques d’Europe, qui est en projet sur le site. Alors que 95% des panneaux installés en Europe viennent d’Asie (essentiellement de Chine), avec un bilan carbone douteux, les promoteurs et responsables techniques de l’usine comptent sur l’impulsion européenne pour rendre leur modèle économique rentable. L’usine s’appuiera sur la technologie Topcon. Elle compte produire sur un site de 18 hectares 10 millions de panneaux solaires par an à l’horizon 2028. Elle emploierait alors 1900 personnes. Son cœur de métier: la fabrication de cellules, dont 1,5 million d’exemplaires devraient sortir des chaînes chaque jour. „A Hambach, nous sommes à huit heures de route de 80% de nos futurs clients“, notent les représentants d’Holosolis, soulignant la différence fondamentale avec le modèle asiatique.

L’interview vidéo de Denis Girardin, vice-président de l’IESF Lorraine:

Du caoutchouc à l’hydrogène

Toute journée MoSarLorLux qui se respecte propose aux participants d’intéressantes visites d’entreprises. Au programme du début d’après-midi, trois sociétés, bien implantées ou en devenir.

  • Le fabricant allemand de pneus Continental est implanté à Sarreguemines depuis 1964. Il vient de sortir son 300 millionnième exemplaire, et ne manque pas de projets de développement.
  • AKG Sarrreguemines existe depuis 1992 et propose des solutions techniques sur mesure pour systèmes de refroidissement haute performance. Ses échangeurs thermiques et refroidisseurs sont destinés à de nombreuses applications: engins de travaux publics, compresseurs, machines agricoles et forestières, engins miniers, ferroviaires, véhicules militaires… Le groupe AKG est présent un peu partout dans le monde.
  • En devenir, Mob’Hy, s’est donné pour objectif de générer une énergie propre et bon marché, qui profite aux habitants et aux clients des territoires d’accueil. Elle veut en implanter une centaine en Europe. La jeune société créée en 2020 a repris la station de production d’hydrogène locale et travaille actuellement sur des débouchés vers l’Allemagne proche.

Mémoire d’industrie

La partie culturelle de la journée a rassemblé tous les participants au Musée des Techniques Faïencières. Franchement, l’endroit vaut le détour, dans une région qui n’est pas naturellement privilégiée pour le tourisme. Le site dit du « Moulin de la Blies » a été, entre 1825 et 1969, l’une des nombreuses unités de fabrication de la Faïencerie de Sarreguemines. Le bâtiment du moulin, devenu musée, servait à la préparation des pâtes à faïence. Il abrite aujourd’hui une importante collection de machines et d’outils dévolus à la fabrication de la céramique. Tout a été reconstitué de manière rigoureuse. Les techniques industrielles et artistiques sont détaillées et expliquées. C’est un plongeon dans le temps vers un petit monde économico – industriel aux normes révolues, qui faisait vivre toute une région.

Autour du bâtiment principal, la nature a repris ses droits, au milieu des friches industrielles. C’est dans ce cadre qu’a été aménagé le Jardin des Faïenciers, imaginé par le paysagiste Philippe Niez. Un lieu à découvrir… par beau temps de préférence.

La journée s’est terminée, comme il se doit, par des agapes conviviales, entre tous les participants. Rien de tel qu’une savoureuse choucroute et un bon vin pour briser la glace, entre Français, Allemands et Luxembourgeois.

L’année prochaine, retour dans la région pour la 37e Journée MoSarLorLux, qui sera organisée autour de Saint-Ingbert (Sarre) par le VDI Saar.

L’album photo de la journée: